Billet d'humeur janvier 2011

Mariage à la chinoise

 

 
En date du 23 décembre 2010, un certains nombre de cousins de la branche Splingaerd d’Alphonse ont reçu ce message empreint de conviction voire de menace provenant de Madame Lang qui est une descendante d'Alphonse Splingaerd. Il était intitulé: Gt-grandma Catherine was not a poor orphan

Nous le laissons à votre appréciation dans sa version anglaise si vous me la sollicitez.

J’ai toujours beaucoup apprécié les histoires qui circulaient dans les familles car elles sont symptomatiques d’un certain état d’esprit. En outre, le récit de ces histoires familiales anciennes est souvent la seule chose qui reste lorsque les archives de ces familles sont définitivement perdues.

Perdues, ce n’est pas le cas en ce qui concerne l’histoire de Paul Splingaerd, de sa femme et de sa nombreuse famille. Les archives subsistent et ont été compulsées et reconstituées. On constate alors une discordance entre certaines traditions qui circulent dans les familles et la réalité historique des choses.

Mme Lang nous communique ce qu’elle a retenu de ce que sa mère (Madame Liang-Splingaerd) et l'entourage de sa jeunesse lui ont donné oralement. Elle dit par exemple que Catherine n’était pas une pauvre orpheline, mais ce n’est probablement pas exact. En effet, Catherine a passé une partie de son enfance et de son adolescence dans un orphelinat de la Sainte Enfance. Qui se trouve dans ce genre d’institution sinon un orphelin? En fait, il est probable que Catherine était au moins orpheline de son père qui s’appelait Li. Et c’est le nom qu’elle décline pour son mariage religieux. Catherine Li, nous ne connaissons pas son nom chinois. D’après Steenacker qui écrit (non pas en 2010) mais en 1907, sa mère s’était remariée avec un certain Tchao car son père était mort. Cela contredit évidemment ce que dit Mme Lang cent ans plus tard puisqu'elle dit qu'elle a perdu sa mère ( "Catherine's mother passed away when she was very young ") et que c'est son père qui s'est remarié. C’est le même Steenacker qui nous apprend que c’est un prêtre et une religieuse qui s’occupèrent de son mariage. Il ne parle à aucun moment des parents de Catherine. On peut considérer qu’elle était orpheline et comme toute les orphelines, elle était pauvre, évidemment. Avez-vous déjà vu un orphelin placé dans une institution qui soit riche ?

Comme c’était le cas à l’époque, Paul et Catherine se sont mariés à la chinoise et leur union n’est pas issue de la fièvre de l’amour ni même d’affinité. Il est probable d’ailleurs qu’il en fut de même avec les trois garçons de Paul qui épousèrent plus tard trois filles de la famille Chang (Zhang-張子因), par pure convention. Il en sera partiellement encore le cas avec le mariage de Joseph Splingaerd en 1942.

Paul Splingaerd s’est marié alors qu’il était âgé de trente et un ans. Je suis tout à fait opposé au fait qu’on lui dénie la liberté d’avoir eu une vie de jeune homme célibataire pendant de nombreuses années avant son mariage, c’était tout à fait son droit. Et cela n’a rien à voir avec le fait qu’il soit resté fidèle ou pas à Catherine durant leurs nombreuses années de mariage. Bien qu’il ait beaucoup fréquenté les prêtres, il n’avait pas fait vœux de célibat et de chasteté. On ne peut donc écarter l’hypothèse qu’il ait eu une vie amoureuse, sentimentale ou sexuelle avant son mariage. Il faut regarder les faits dans leur réalité historique : les étrangers qui étaient en mission dans les pays de colonie avaient presque tous une concubine locale. Les exemples sont légion. Et ils ont laissé sur place des petits eurasiens. Pourquoi Paul aurait-il fait autrement que les autres ?

Paul Splingaerd a eu une vie intéressante et exemplaire mais il ne faut pas le considérer comme un saint. Aujourd’hui, en 2011, nous sommes incapables d’appréhender la mentalité, l’esprit et la conduite des gens de son époque. On ne peut juger.

("..... there were many Belgians in Lanzhou who were jealous of Paul "). Quant à savoir s’il avait des ennemis, cela me semble très improbable. Il était trop bon pour en avoir. Il a eu des démêlés avec les officiers belges, c’est connu et ils lui ont sans doute fait du tord en Belgique, mais qu’il ait eu des ennemis européens à Lanzhou où il n’est resté que quelques années est douteux. Avant l’arrivée de Muller et les autres ingénieurs en 1906, il n’y avait pas de Belges à Lanzhou sauf les prêtres. Les affirmations de Mme Lang ne reposent sur rien qui ne soit confirmé. C’est le vent qui souffle dans les plaines de l’Asie Centrale……

Que Paul Splingaerd ait eu des opposants, surtout parmi les chinois, n'est pas exclu par contre,. Il y a de nombreuses raisons dont la principale est sans doute le fait que Paul était un étranger et qu'il était chrétien. Et que malgré ces éléments certains, il était un personnage considéré et connus des dirigeants chinois et qu'il portait haut ses attributs de mandarin de haut niveau civil et militaire, se promenant en baldaquin précédé de son parasol de parade, fréquentant la cour du Vice-roi et du gouverneur. Cela devait entraîner des envies et des jalousies parmi les chinois eux-mêmes. Les missions de Paul comme conseiller à la Cour restent relativement imprécises malgré les quelques éléments connus. On ignore si sa position comme fonctionnaire était vraiment une position privilégiée ou s'il était simplement dans une position ordinaire. Il faut tenir compte que Lanzhou était une ville importante à cette époque comme aujourd'hui. Elle était la capitale de la grande province du Gansu. Elle était le siège du gouvernement provincial du Gansu mais également du Shaanxi. Il y avait donc du temps de Paul, non pas quelques fonctionnaires à Lanzhou mais des centaines, voire des milliers. La place exacte que Splingaerd occupait parmi ces fonctionnaires de l'Empire est et restera toujours imprécise. Mais c'est vrai qu'il n'est pas impossible qu'il y ait eu un climat de jalousie autour de Paul.

("Anyone who spreads bad rumors about Paul Splingaerd are on the side of his enemies "). Les gens qui aujourd'hui tentent de reconstituer l'histoire de Paul et de Catherine ne sont certainement pas leurs ennemis. La vérité est parfois contrariante mais celui qui la cherche n'est pas pour autant un ennemi. C'est vrai qu'il faut être prudent lorsque l'on a un auditoire mais lorsque l'on veut contrarier un auteur, il faut pouvoir apporter des éléments plus probants que de simples histoires.

 

 

Christian Goens

 

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