NOTES BIOGRAPHIQUES SUR BAESENS
Biographie Nationale (de Belgique), tome XXXI, 1961-1982, pp 41-43
BAESENS (Jean - Clément), officier, né
à Brasschaat le 10 mai 1849, décédé à
Watermael - Boitsfort le 19 mai 1941 [Belgique].
Il était
le fils d’un officier d’artillerie, Joseph-Clément
(1796-1 875) [et de Boelé Marie Wilhelmine - capitaine au
premier régiment d'artillerie, chevalier de l'ordre de Léopold
(1834)], qui s’était distingué au cours des
campagnes de 1815 et de 1830 et avait publié une Méthode
naturelle universelle pour soulager ses semblables et les préserver
des maladies (Bruxelles, 1856). Baesens s’engagea comme
volontaire, le 19 septembre 1864, dans l’artillerie et y fit
toute sa carrière, Maréchal des logis en 1866,
sous-lieutenant le 1er août 1872, lieutenant le 25 mars 1876,
capitaine en second de 2 classe le 17 octobre 1885 et de 1re classe
le 6 avril 1886, il fut promu capitaine commandant le 27 septembre
1887 et désigné pour le 6e régiment
d’artillerie.
Passé au 7e d’artillerie en 1889, il y servait encore lorsqu’il fut détaché, le 13 octobre 1896, à l’Institut cartographique militaire et désigné avec l’approbation du Roi (selon la formule consacrée) pour être attaché provisoirement à la légation de Belgique à Pékin. En réalité, cétait bien Léopold II qui, ne cessant de suivre depuis longtemps les événements de Chine avec attention et curiosité et sachant, d’autre part, qu’un décret impérial de 1895 avait autorisé la formation d’une société chinoise pour la construction d’un rail Pékin-Hankow, rêvait de faire profiter son pays de circonstances qu’il jugeait favorables à ses desseins. Pour exécuter certains de ceux-ci, divers représentants du Roi se trouvaient en Extrême-Orient : le comte Ch. d’Ursel, ministre plénipotentiaire de l’Etat du Congo, et plusieurs officiers : le major G. Fivé et les commandants d’artillerie A. Wittamer, C.-J. Servais et V. Richard, ceux-ci chargés d’étudier les ressources de la Chine, sa formation géologique, ses gisements minéraux, ses besoins industriels et commerciaux. Ce fut une mission du même genre qu’avec son titre d’attaché militaire et commercial de Belgique à Pékin, Baesens fut chargé d’assumer provisoirement dans l’ombre du héros de l’insurrection des Taï-Pings, le très influent Li Hung Tchang, devenu généralissime, grand chancelier et vice-roi du Petchili, et que Léopold II avait réussi à attirer à Bruxelles durant l’été 1896.
Yuan-Shi-Kaï
Le 1 novembre 1897, Baesens fut mis en congé
sans solde pour servir en Chine avec l’autorisation royale. Il
était, en effet, devenu le conseiller militaire de
Yuan-Shi-Kaï qui, d’abord protégé par Li
Hung Tchang, était l’un des chefs du parti moderniste :
il tentait de transformer le vieil Empire en réorganisant son
armée à l’européenne et fut en 1911 le
premier président de la République chinoise. Les
prestations de Baesens, qui conseillait surtout Yuan-Shi-Kaï en
matière d’artillerie, lui valurent les insignes 1 classe
du 3 degré du Double Dragon de Chine, mais firent rebondir en
Belgique la question de savoir si notre neutralité, aux termes
du traité de 1839, s’appliquait ou non aux seuls pays
d’Europe. Quoi qu’il en soit, l’officier ne rentra
au service actif à son régiment, en août 1899,
que pour se voir pensionner le 23 décembre de la même
année.
Il fit encore plusieurs séjours en Chine
pour le compte d’un consortium financier et industriel belge (nous en avons des traces avec la correspondance de Madame Tysebaert).
Mais l’invasion du territoire national le vit, dès le 5
août 1914, reprendre du service en qualité de major de
réserve, grade qu’il avait obtenu le 26 mars 1913.
Désigné pour le Grand Parc de campagne, il commanda la
Garde civique de Borgerhout pendant le siège d’Anvers.
Il fut encore affecté à la direction des chemins de fer
de l’armée de campagne le 9 août 1916, comme
commissaire délégué belge pour le réseau
du Nord Français le 4 janvier 1917, comme commandant de la
gare d’Aix-la-Chapelle le 10 janvier 1919 et membre de la
commission régulatrice de l’armée d’occupation
le 6 février suivant. Il fut pensionné définitivement,
avec le grade honoraire de lieutenant-colonel, le 10 juillet 1920.
Son fils Armand, officier d’artillerie lui aussi, devint
lieutenant général (1879-1957).
(s) Albert
Duchesne.
Renseignements très
aimablement communiqués par la Générale A.
Baesens.
Archives du Musée royal de l’Armée,
doss. 0.8887. — Archives du Ministère des Affaires
étrangères, doss. n° 13 et n° 330.
—
Revue Chine et Belgique. août-octobre 1907, p. 109 ; novembre
1908, p. 176 novembre 1909, p. 230, etc. — L’Expansion
belge, août 1908. — Etc.
Dans le cadre de notre étude de la descendance de Paul Splingaerd alias Lin Fuchen, pourquoi s'intéresser à cet officier belge?
La raison chronologique est que Baesens fut en Chine comme conseiller militaire d'octobre 1896 à août 1899. Mais il y a d'autres raisons.
D'après le Père Rutten qui nous dit: (Kadoc - Leuven A IV b 4/3)
...... [il semble qu'il ait interviewé Anna Splingaerd, la fille du général Splingaerd, la plus jeune des religieuses - Mère Dosithée) à une date indéterminée mais sans doute après 1950]
........Paul Splingaerd a adopté deux autres enfants sans ressource ..........L'un, Paul Lin est mort (pieusement) à l'Hôpital St Marie à Shanghai, il était pauvre - il était le fils du Col. (ou Cap.) Basens, un belge instructeur dans l'armée chinoise vers 1890 ?). Ce Paul Lin a trois garçons qui sont encore à Shanghai (dit Anna).
Il s'agit de Lin Sheng Yu ( 林生玉 )- (°Tianjin 02/08/1898 - +Shanghai Hopital Sainte Marie 18/12/1935) dont la descendance actuelle est connue (voir la planche). La famille croyait qu'elle descendait directement de Paul Splingaerd, ce qui n'est pas le cas. Quelle est dès lors l'intervention de Paul Splingaerd dans cette affaire? Certainement parce qu'il prit cet enfant en compassion, abandonné sans doute par son père retourné en Europe.. Il fut probablement son parrain et c'est ainsi que l'enfant garda le nom chrétien de Paul Lin (Lin étant le nom chinois de Paul Splingaerd (林 脯臣). Lin, nom patronymique qui a été transmis sur trois et même quatre générations. Quant à savoir si la famille Baesens actuelle est consciente de l'existence de leur cousin génétiques Chinois, nous n'en savons rien pour l'instant - sans désespérer d'un contact qui nous semble malgré tout aléatoire (la recherche d'un contact est difficile étant donné le nombre de Baesens qui vivent en Belgique). On ne peut exclure que de la correspondance, des rapports, des factures ou mémoire de voyage puissent encore subsister, qui apparaîtront enfin au jour lorsque les héritiers se sentiront délivrés du poids d'un certain secret de famille. J'en appelle à eux s'ils me lisent. C'est pour l'Histoire. |
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Donc, d'une union interraciale entre l'officier belge et une autochtone serait né cet enfant adopté par Paul Splingaerd et sa femme Catherine. Nous n'avons aucune idée du nom de la mère. Quant à Paul, il se rappellera toute sa vie qu'il avait été lui-même un enfant abandonné. La mort prématurée du mandarin blanc (1906) fut probablement un point d'arrêt de la relation entre les Splingaerd et cet enfant. La famille se souvenait quand même qu'un fils de Paul Lin était devenu prêtre.
D'une manière transcendante cela pose toute la problématique des concubinages entre les 'colonisateurs' et les 'colonisés', soit d'une manière générale entre les caucasiens et les femmes africaines ou chinoises, à l'époque.
Il faut savoir qu'il existe une abondante littérature sur le sujet, à savoir le comportement sexuel des européens en mission, généralement célibataires, et les femmes des populations locales. Ce phénomène, qui existe depuis l'époque de Cortès - soit le début des colonisations - a tout au long de l'histoire suscité beaucoup de débats mais on pourrait les résumer de cette manière: la plupart des gens qui partaient pour de longues périodes à l'étranger (souvent des jeunes gens forts et virils) ne pouvaient s'adresser qu'à la prostitution ou au concubinage pour "garder la santé et leur équilibre". Il existait également un besoin de gérer un ménage et une maison. C'est la raison pour laquelle ces femmes concubines sont appelées en français "les ménagères". Dans la société du dix-neuvième siècle et du début du vingtième, on considérait que le concubinage interracial dans les colonies était une attitude normale et même 'prophylactique' (on pense ici à une mesure de stabilité écartant le péril vénérien - contrairementà la prostitution). Les études sur le sujet font plutôt état du phénomène mais ne discourent pas sur le devenir des enfants issus de ces relations particulières, sauf de dire que le métissage mondial (probablement plusieurs centaines de millions d'individus), provient de ce type de relations et n'est pas issu de "mariages légaux". Et ce, depuis 500 ans.
Etant donné donc le laxisme existant à cette époque à ce sujet, tant dans les colonies qu'au niveau métropolitain, il ne faut donc pas s'étonner de retrouver dans l'histoire d'un famille un cas particulier auquel celle-ci est sensibilisée.
Dans mon étude de la famille Pourbaix, j'ai déjà étudié un autre cas (également un officier belge, au Congo - à la même époque). On y constatait la présence d'un enfant auquel les missionnaires avaient donné le nom du père qui était décédé lors d'un retour en Europe pour cause de maladie. Il est mort en mer. Cet enfant a donné lieu a une nombreuse descendance établie aujourd'hui en Belgique, au Congo et en Hollande et sont métissés. La famille n'éprouve aucun scrupule à raconter l'histoire de leur famille et c'est bien naturel et légitime.
Pour l'instant, nous ne possédons aucun document faisant état d'une relation entre Paul Splingaerd et le conseiller militaire Baesens entre 1896 et 1899, mais ce n'est pas exclu puisque Splingaerd était revenu à Tianjin et Pékin à cette époque et était souvent en relation avec les officiers léopoldiens en mission.
Nous ne possédons pas de portrait de Jean-Clément Baesens. Tous renseignements à son sujet sont bienvenus.
Après plus de cent ans, nous essayons de relayer l'histoire en mettant en avant la non responsabilité morale ou autre des descendants qui peuvent penser à leur passé sans préjugés.
Nous ne pouvons pas proposer ici une bibliographie complète sur le sujet mais j'attire l'attention sur un ouvrage en français qui m'a semblé digne d'intérêt (et qui fournit une vaste bibliographie) qui est:
"Coloniaux, ménagères et prostituées - Au Congo belge (1885-1930)" de Amandine Lauro. Edition Labor - 2005 ISBN 2-8040-2063-0. Amandine Lauro est anthropologue (ULB) et historienne (ULB).
NB: "ménagère" est un terme hypocrite mais conventionnel pour désigner la femme africaine qui vit en concubinage avec un blanc.
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last update 6 juin, 2019