CONSIDERATIONS SPECULATIVES SUR LE TESTAMENT D'UN BOURGEOIS APRES L'EMPIRE

Ferdinand Emmanuel POURBAIX


 

Je n'aime pas spécialement les choses compliquées, mais le généalogiste est amené régulièrement à pratiquer des analyses, voire des spéculations, sur des situations qui se sont présentées et pour lesquelles les documents à disposition restent dramatiquement limités.

Ma réflexion part du contraire de l'ordinaire: un certain nombre de jeunes filles, voire de dame Pourbaix nous ont laissé des petits POURBAIX, dont certains descendent, alors qu'ils ne devraient pas s'appeler POURBAIX. Ce sont des "faux POURBAIX", en quelque sorte qui viennent gonfler la masse des ressortissants du clan. Ce phénomène a toujours existé et existe toujours, même à l'heure de l'avortement aisé et légal et même à l'heure où un concubin peut reconnaître facilement un enfant et lui donner son nom.


Vous avez également le cas des enfants adultérins, connus beaucoup plus rarement, illégaux tant que le géniteur est encore marié. Impossible de lui donner son nom.

Pas possible de lui donner son nom mais peut-être bien une partie de sa fortune, c'est à dire ce qui n'est pas grevé par les héritiers réservataires, ceci indépendamment des droits généralement exorbitants qui affectent ce genre de transmission.

Il nous semble que nous possédons un tel cas, révélé par un testament. Nous allons le commenter et chacun pourra se faire une opinion quant aux spéculations.

Le personnage principal de cette affaire du début du dix-neuvième siècle est Ferdinand Emmanuel Joseph Pourbaix. Nous sommes juste après l'Empire, pendant la première période de la première royauté.

Arpenteur juré principalement occupé au Charbonnage, il descend d'Auger Pourbaix dont il est un des innombrables petits-fils. Ne pas le confondre avec un autre Ferdinand Joseph Pourbaix, également arpenteur dont nous parlons dans un autre article. C'était son père. Voici sa lignée:

2537 POURBAIX Ferdinand Emmanuel Joseph
253 POURBAIX Ferdinand Joseph
25 POURBAIX Jean-Baptiste
2 POURBAIX Auger

Il descendait des POURBAIX, des BLANQUET, des RIPOTEAU. Autrement dit des personnages hauts en couleurs qui avaient créé les charbonnages de Bois-du-Luc et de Stépy-Braquegnies.

Ce qui expliquerait son alliance: à l'âge de quarante ans, il épouse THIRIAR Bonne Philippe, avec dispense pour le troisième degré canonique, fille de Nicolas THIRIAR et petite fille de Gaspart THIRIAR, ces deux derniers co-créateur des charbonnages de Saint-Vaast. Elle était également âgée de quarante ans. Mariage d'intérêt? Peut-être et probablement avec un contrat de mariage du genre séparation des biens. Mariage de type social, de type milieu fréquenté, certainement. Tous ces maîtres de charbonnage se connaissaient et se fréquentaient; ils s'entendaient comme cul et chemise de par leur fortune et leurs habitudes de vie.

De ces noces, il ne vint pas d'enfant. Mais l'arpenteur avait quelque fortune à céder et ne semble pas disposé, à l'heure de son trépas, de la céder à son épouse qui devait être bien nantie également, comme descendante de maîtres de fosse.

D'où la rédaction d'un testament, devant quatre témoins et un notaire officiant. Ce testament est assez spectaculaire dans la mesure ou le notaire décrit en quelque sorte la scène:

"Fut présent le sieur Ferdinand Emmanuel Joseph Pourbaix, arpenteur juré domicilié à Gaugnies houdeng
Lequel, quoique malade dans son lit, dans une chambre aiant vue sur la place de Gaugnies, par deux croisées, mais sain d'esprit, mémoire, entendement et jugement, ainsi qu'il nous est apparu et aux témoins, a fait et dicté, à moi Notaire qui l'ai écrit tel qu'il m'a été dicté, en présence des dits quatre témoins son testament, ainsi qu'il suit".

Il est tout à fait curieux de constater que l'acte qui nous est parvenu est une copie (expédition) apparemment destinée à "…..Thiriar, Vve Pourbaix N° un comme pièce unique".

Donc, en première analyse, Bonne Philippe Thiriar est toujours vivante. Ce qui va être un peu choquant quand on saura quelles sont les dispositions testamentaires que va prendre le testateur.

L'acte fut rédigé le dimanche 21 avril dix-huit cent seize à huit heures du matin et fut signé par tous les participants, y compris le testateur.

Voici quelle fut la substance de ce testament:

"J'institue mon légataire universel rien excepté ni réservé, tant des biens meubles qu'immeubles dont je pourrais disposer au jour de mon décès Napoléon Trouillez, fils naturel de Marie Thérèse Trouillez. J'institue pour exécuteur de mon présent testament le sieur Emmanuel Debauque, notaire à Feluy, mon filleul."

Voilà, à vous de penser ce que vous voulez. J'ajoute que les parts de charbonnages sont considérées comme bien immeubles et que les dividendes seuls sont considérés comme meubles.

Ajoutons que Ferdinand est décédé moins de deux semaines plus tard, le 2 mai 1816 et que sa femme était une cousine au troisième degré canonique.

Testament de Pourbaix Ferdinand, notaire Mangin, numéro 947, archives notariales, A.E.Mons. 21/04/1816.

Pour terminer, le testament se dispensant d'inventaire, nous ignorons si à cette date, l'arpenteur possédait encore des parts de fondateur du charbonnage.

Enfin, la liste des nonante actionnaires du charbonnage du 2 août 1824 ne mentionne pas de Trouillez. Ce qui ne veut pas dire qu'il n'en a pas hérité vu qu'il peut très bien les avoir déjà vendues à cette date. Cependant, vu la liste connue des passassions d'actions pour cette période, on ne voit nulle trace d'un actionnaire Trouillez vers un tiers déjà actionnaire ni trace d'une admission par héritage d'un nommé Trouillez au sein du groupe des actionnaires du charbonnage.

On en conclu provisoirement que Ferdinand Emmanuel Pourbaix n'avait plus de parts du charbonnage créé par son aïeul cent quarante ans plus tôt.

 

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