POURBAIX Charles Augustin Joseph, receveur

Une dynastie de receveurs de charbonnage

Voulez-vous faire connaissance avec un personnage de la famille assez intéressant, voire fascinant ? Alors, lisez les pages qui suivent. Vous vous apercevrez que la vie industrielle et commerciale d'antant n'a rien à envier à la façon dont nous vivons aujourd'hui, lorsqu'il s'agit de défendre ses intérêts, son droit; de gérer sa fortune ou celle des autres, des tâcher de prospérer dans les affaires, etc. Rien n'est changé.

Au dix-septième siècle, dix-huitième siècle et même pendant une partie du siècle suivant, dans la gestion des charbonnages de notre région et même d'une partie du Hainaut, un des personnages les plus importants des sociétés charbonnières était le receveur. Le receveur était le personnage qui avait la garde de la recette, c'est à dire de l'argent que la société recevait du fait de son commerce et de son activité. Il s'occupait également des fournisseurs et des dépenses de fonctionnement y compris la paie des mineurs et autres ouvriers et fonctionnaires. Le conseil des actionnaires n'étant intéressé que par le revenu de leur placement, le receveur était à leur yeux le personnage le plus important et très souvent, leur seul intermédiaire même si le ou les contrôleurs intervenaient également pour vérifier à la fois le fonctionnement et ....le receveur. A une époque où la fonction de directeur de travaux n'était que celle du bon fonctionnement technique et humain, le receveur jouait en quelque sorte de tampon entre exploitation et actionnaires. C'est un peu le rôle d'un administrateur délégué aujourd'hui. A la foi en plus simple et plus complexe de par la diversité des charges: il était également le comptable, en quelque sorte. C'est d'ailleurs de cette manière que le receveur, au fil des siècles, ne devint plus qu'un employé, voire qu'un simple employé à une époque où la structure des sociétés s'est rapprochée insensiblement des formes d'administration de société telle que nous les connaissons aujourd'hui.

Bien entendu, c'était le personnage le mieux payé de tout le personnel de ces sociétés charbonnières. Chargé de la recette et d'en rendre compte, il avait également en charge de garder des sommes souvent très importantes. En fait on ne sait comment il assumait cette garde, on a peu de détail à ce sujet. Y avait-il des coffres et des caves blindées, y avait-il simplement un coffet placé sous un matelas ? On ne sait. En attendant de payer des fournisseurs ou de distribuer des dividentes, il semblerait que certains receveurs plaçaient cet argent en attente dans des investissements, à la manière des banquiers modernes. Il appert même que certains prirent le risque de trop jouer avec cet argent qui leur était confié et lorsqu'ils devaient en rendre compte, ils ne purent présenter les sommes requises.

Du fait de ce rôle important de recevoir la recette et de la gérer, pour devenir receveur, il fallait évidemment montrer patte blanche et être nanti financièrement. La caution exigée d'un receveur postulant était de l'ordre de dix à trente ans de salaire. Cette caution devait être immobilière de manière à assurer une certaine pérennité, des actions de société ou des bâtiments, par exemple.

Le rôle de receveur se limitant à l'action que nous avons décrite, elle ne constituait pas un emploi à temps plein et c'est la raison pour laquelle la plupart des receveurs que nous avons connus exerçait en parallèle un autre métier, comme cabaretier ou aubergiste, receveur dans une autre société ou meunier. De ce fait, dans une ville ou un village, le receveur était un personnage important et il n'est pas rare de constater que le personnage est homme de fief ou bailli ou maïeur d'une communauté.Ce fut le cas de Charles Augustin POURBAIX, classé dans notre systématique comme 232.

Le charbonnage qui nous occupe, avec Charles Augustin Joseph Pourbaix (1711-1779) est évidemment le Charbonnage du Grand Conduit de Houdeng qui deviendra, au fil du temps le charbonnage de Bois-du-Luc. Il était le petit-fils d'Auger via Jean-Joseph Pourbaix. Il fut d'abord contrôleur du charbonnage puis receveur de 1734 à 1779, mandat dont la longévité ne fut jamais dépassée.

Nous n'avons pas de portrait de ce personnage, mais, à défaut, voici sa signature

QUELQUES REFERENCE

Signature en qualité de maïeur, acte scabinal Houdeng 1762, archives privées - Succession RIPOTEAU Alexandre - copie. Signatures authentiques dans Fonds DE PESTRE, A.E. Mons, lettre 76 du 10 juin 1772, que l'on peut comparer avec une autre pièce déjà citée ailleurs. Il est également cité mayeur de Houdeng-Goegnies dans un acte scabinal du 25/11/1755 ( A.E. Mons, abbaye de ST-Feuillien, N° 455).

Sa nomination au poste de receveur date du 04/09/1731 (A.E. Mons, [Charbonnage de] Bois-du-Luc, registre des résolutions, page 54 et 55).

La date de son décès est attestée page 74 recto, scéance du 12/03/1781, registre cité.

Voir également 'Succession Marie Françoise Pary 1806', A.E. Mons, archives notariales, notaire Masson, acte du 17 mai 1806.

Voir également 'Vente à réméré entre Jean Alexandre VRAY et Charles Augustin Joseph Pourbaix 20/06/1739', A.E. Mons, archives notariales, divers anciens du notaire DE QUANTER, dossier 3016 (signature de Charles Augustin Joseph). Marié en 1736, Charles Augustin Joseph achète une maison et héritage d'un bonnier au Croquet.

Il est resté presque 50 ans receveur du charbonnage de Bois-du-Luc et a marqué sans doute toute une époque. Au village, il était sans doute un personnage très important; il en fut d'ailleurs bourgmestre.
Ce que l'on sait moins, c'est le rôle exact qu'il joua dans les charbonnages voisins et particulièrement au charbonnage de MAUGRETOUT de St-Vaast. En fait, c'est son fils Martin Joseph qui avait tenté d'obtenir ce poste mais nous n'avons pas la preuve qu'il en fut ainsi. Le receveur d'Houdeng semble cependant avoir obtenu cette charge à MAUGRETOUT pendant un certain temps, ce qu'atteste la correspondance qui va suivre, adressée à "Monsieur Philippe, Bailly et mayeur du village de Seneffe audit lieu" (A.E. Mons, fonds De Pestre, lettre 76).
Philippe était bailli de la seigneurie de Seneffe, tenue par le comte DE PESTRE, le fameux bâtisseur du merveilleux château du même lieu. Il fut postérieurement la résidence du Général VON FALKENHAUSEN, gouverneur allemand de la Belgique en 1940 et qui maintenant est devenu le musée de l'orfévrerie.
On remarquera une orthographe particulièrement fantaisiste et une façon de s'exprimer qui s'aproche plus du parlé du 17 ème que du 18 ème siècle, probablement typiquement vernaculaire.

Comme disait l'humoriste, "pour bien causer, y cause bien"

"Monsieur,

j'ay l'honneur de vous l'écrire cette de la parte des héritiers de Pierre Roland, cy devant Receveur du charbonnage de Malgretout, pour par eux pouvoir obtenir la caution qu'avoit donné ledit Roland pour sa recette, et le retirer comme sa veuve en a rendu par son compte dernier les appaisements qui sont jointe en datte du . 1769 par lequel il résulte un bony de 79 lv 1 s, soustraite de cette de 67 lv 8 s luy rayee faute des aproduire les acquit suffisant, cependant je vous prie de vouloir donner jour pour finir en entiere de cette maniance à votre loisir, ce qu'esperant de votre bonté ordinaire, j'ay l'honneur d'être très parfaitement

Monsieur

votre très humble très obéissant serviteur
C.A.J. Pourbaix, Receveur
des fosses d'Houdeng"

Note: le charbonnage de Maugretout à Saint-Vaast fut une catastrophe financière. Et malgré que l'implantation ne semblait ne rien rapporter, les investisseurs et les ouvriers continuèrent longtemps, malgré tout, à creuser ce sol ingrat. En réalité, le terrain était marécageux et peu propice, toujours inondé. Il se situait là où se trouve actuellement la place de l'église de La Louvière (Saint-Joseph), en plein centre actuel.

ELEMENTS GENEALOGIQUES

Charles Augustin Joseph POURBAIX était né de Jean Joseph à Houdeng-Aimeries le 09/08/1711. Il est décédé au même lieu le 22/06/1779 à l'âge de 68 ans. Receveur de charbonnage pendant 45 ans, il est décédé en fonction. Maieur de sa communauté pendant une période non précisée (cité au moins en 1747), il avait été créé homme de fief d'Hainaut à Mons le 11 mai 1739. Il avait épousé à Houdeng-Aimeries le 07/02/1736 HENRY Marie Françoise, née en 1708 de Philippe Christophe et de DESENFANTS Catherine et décédée à Houdeng-Aimeries le 14/04/1775, quelques années avant son mari à qui elle donna sept enfants dont Martin et l'abbé Bernard.

La famille de Charles Augustin donnera un beau-fils contrôleur Jean Joseph HAYE , Martin sera receveur Martin Pourbaix comme son père et son beau-père Josse MONOYER et son arrière-petit-fils Charles Augustin Joseph Pourbaix Charles Augustin Pourbaix junior sera également receveur du charbonnage de Bois-du-Luc, le dernier, de 1824 à 1847. La descendance s'éteignit avec se dernier. Et n'oublions pas son fils le chanoine Bernard Pourbaix qui fit jouer aux Pourbaix une dernière passe dans l'histoire du charbonnage Bernard Pourbaix .

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